Souvenirs d'été, souvenirs d'enfance : 1 première séparation
En ce défi n°59, Jill Bill a mission de piloter les coques de noix des CROQUEURS DE MOTS sur la route de nos plus beaux souvenirs d'enfance de vacances d'été.
Mais comme je le lui indiquais en commentaire :
"Tu nous fais faire une cure d'enfance alors et il va falloir en privilégier un au détriment de tous les autres ..."
auquel Jill Bill a répondu :
"Mais tu peux très bien en décrire plusieurs ... pourquoi pas ?"
Sous-entendu, choix difficile pour ma tête emplie de ces souvenirs précieux, indélébiles et bien plus précis ... pour ces quelques dix à quinze années lointaines, que toutes les années d'adulte, une bonne quarantaine, qui ont suivi.
Les bons, et les moins bons, c'est vrai, comme ce dépit, malgré la gentillesse de ma tante et de mon oncle, quand mes parents, que je suivais partout, sont allés sans moi, pour la première fois, au mariage d'un cousin auquel je n'étais pas invitée.
Ce n'était pas à mon intention spécifique mais dans les familles élargies très nombreuses, il faut bien à un moment donné mettre une limite. Pourquoi moi et pas mes frères et sœurs ainés (nous étions 7) et pour les plus âgés, leurs époux et leurs enfants, sans compter qu'il y avait d'autres cousins ...
Avec le recul, je me dis que mes parents avaient, pour la première fois de leur vie commune peut-être, l'occasion de faire un voyage rien que pour eux deux.
Peut-être pensaient-ils aussi, à juste titre, qu'il me serait plus facile d'apprécier mon prochain premier séjour en colonie de vacances. Mes colonies de vacances seraient ensuite une mine inépuisables de bons souvenirs.
Mais que j'étais chagrine d'être laissée hors de ces réjouissances !
Alors, au cœur solitaire de la nuit, pour me consoler de cette première séparation, dans la molle chaleur du lit de plume, après des journées gaiement remplies, je faisais défiler les souvenirs en cherchant à oublier les descentes de lit en peau de bête dont l'une des têtes ressemblait fort à un loup, et les ponctuations des heures sans sommeil par l'horloge de la cuisine et le coucou de la salle à manger. Elles étaient réglées exprès avec un léger décalage. Imaginez le bruit du temps vers les onze heures et les minuit !
J'égrenais les surprises des journées à la campagne rythmées par l'observation des tâches villageoises, comme le jour de lessive au lavoir. Mon souvenir récurrent à l'époque était celui de l'anniversaire de l'année d'avant.
Le sommeil me cueillait enfin et me transportait déjà au lendemain où dès sept heures du matin, la voix de la Marie du moulin me réveillerait inévitablement :
" Qu'e'q c'est-y qui dit l'baromètre pour C'tantôt ?"
Je me rendormirais une bonne heure ou plus, maudissant cette voix trop matinale que les "chut" de mon oncle ne calmait pas, en pensant aux appétissantes gelées de groseille et de framboise et au lait tout chaud encore, que la brave fermière venait de porter juste après la traite.
A suivre ...