jeudi 27 juin 2013

Ma fille, de Serge Reggiani

Oui, je sais bien que Brunô a suggéré "Le peintre", en toute liberté et me voilà vous proposant une chanson pour ce deuxième jeudi en poésie du défi n°105 des CROQUEURS DE MOTS.
C'est que si Serge Reggiani, "immense acteur et chanteur bouleversant" (clic) était aussi un peintre, j'avoue être beaucoup moins attirée par sa peinture, dont la desespérance me met mal à l'aise que par la poésie de ses textes et sa voix incomparable.
Serge Reggiani a d'ailleurs magnifiquement dit en chanson "Et moi je peins ma vie" (paroles sur ce blog, illustré d'une toile de Y. Huchet ; clic sur le titre pour écouter la chanson par Reggiani)

Le 27 juin est surtout un jour bien particulier et il me faudrait un cas de force majeure pour manquer ce rendez-vous (même de loin, même uniquement en pensée ...)

A écouter et regarder chanté en duo par Serge Reggiani et sa fille Carine CLIC

Ma fille

Ma fille, mon enfant
Je vois venir le temps
Où tu vas me quitter
Pour changer de saison
Pour changer de maison
Pour changer d’habitudes
J’y pense chaque soir
En guettant du regard
Ton enfance qui joue
A rompre les amarres
Et me laisse le goût
D’un accord de guitare

Tu as tant voyagé
Et moi de mon côté
J’étais souvent parti
Des Indes à l’Angleterre
On a couru la Terre
Et pas toujours ensemble
Mais à chaque retour
Nos mains se rejoignaient
Sur le dos de velours
D’un chien qui nous aimait
C’était notre façon
D’être bons compagnons

Mon enfant, mon petit
Bonne route… Bonne route
Tu prends le train pour la vie
Et ton cœur va changer de pays

Ma fille, tu as vingt ans
Et j’attends le moment
Du premier rendez-vous
Que tu me donneras
Chez toi ou bien chez moi
Ou sur une terrasse
Où nous évoquerons
Un rire au coin des yeux
Le chat ou le poisson
Qui partageaient nos jeux
Où nous épellerons
Les années de ton nom

A vivre sous mon toit
Il me semble parfois
Que je t’avais perdue
Je vais te retrouver
Je vais me retrouver
Dans chacun de tes gestes
On s’est quittés parents
On se retrouve amis
Ce sera mieux qu’avant
Je n’aurai pas vieilli
Je viendrai simplement
Partager tes vingt ans

Mon enfant, mon petit
Bonne route… Bonne route
Sur le chemin de la vie
Nos deux cœurs vont changer de pays
Chanson interprétée par Serge Reggiani , Paroles: Eddy Marnay. Musique: Raymond Bernard, 1971


à toi, ma fille

lundi 24 juin 2013

Défi n°105 : "La Toile se dévoile"

Dernière escale des CROQUEURS DE MOTS avec le défi n°105 piloté par l'Amirâl historique Brunô, avant une pause d'été. Mais pas de point final, les défis continuent à la rentrée et les nouvelles candidatures seront bienvenues.
Pour tous renseignements s'adresser au bureau du port, je veux dire La Coquille.

Consigne : "A partir du tableau de Balthus, le peintre et son modèle, donnez libre cours à votre imagination, en prose ou en vers ... Les choix sont multiples, ouverts et libres."

vendredi 21 juin 2013

En attendant l'été, de Willow

Un bonus pour Brunô et les CROQUEURS DE MOTS déposé en commentaire hier sous D'un vanneur de blé aux vents, ainsi que chez Eglantine-Lilas, peut-être ailleurs ...

En attendant l’été

Sur ma table à dessein
J’ai disposé des fleurs
Pour que naisse la faim
Attendue de cent heures
Le printemps fut pluvieux
Si glacé dans ses eaux
Que même au coin du feu
On risquait notre pot
Chat leurre tant espéré
Egayant le mot râle
Apporte-nous l’été
Car il est notre Graal
Willow



Des vertes années
Il me reste cette image
Du chemin mouillé

Un matin après l'orage
Et cette eau qui ruisselait
Jeanne Fadosi, vendredi 21 juin 2013

post scriptum
Mémoire oublieuse
De ces mains tendues
Soulageant vos peines
Peine Perdue 
 Jeanne Fadosi, dimanche 13 septembre 2015

jeudi 20 juin 2013

D'un vanneur de blé aux vents, de Joachim Du Bellay

Pour le défi n°105 des CROQUEURS DE MOTS sous la houlette de l'initiateur de la communauté Brunô, la suggestion du jeudi en poésie (juste une suggestion à suivre ou à ne pas suivre) est
"En attendant l'été"

mercredi 19 juin 2013

jeudi 13 juin 2013

En wagon, de Albert Mérat

C'est Eglantine-Lilas qui s'y colle chez les CROQUEURS DE MOTS pour ce défi n°104 et avant dernier avant les vacances d'été
Dernière nouvelle tombée hier soir émise par Eglantine et Tricôtine : le cap'tain de quart pour le défi n°105 est trouvé. Mais elles en font un mystère pour l'instant ... Suspense ...


La suggestion pour ce jeudi en poésie, sans obligation, comme d'habitude, est :
La campagne, la nature, les arbres, les petits oiseaux etc ...

Je réédite donc ce poème de Albert Mérat, mis en ligne l'été dernier pour illustrer la lettre w de mon alphabet en poésie

En wagon

Du wagon sombre où rien ne bouge, où rien ne luit,
Las des rêves, mauvais compagnons pour la nuit,
Le voyageur, avec le jour, cherchant l'espace,
Salue en souriant la campagne qui passe :
Les arbres, les moissons hautes, l'azur des prés
Lointains, sur le penchant des coteaux diaprés,
Les villages qui sont tout proches de la route,
Les troupeaux ruminants et doux, mis en déroute
Par le bruit, les maisons blanches, l'horizon clair ;
Et dans un champ rougi des premiers feux de l'air,
Tandis qu'un clocher fin carillonne une fête,
Des travailleurs courbés, et qui lèvent la tête.

Albert Mérat

Albert Mérat, 1840 - 1909. Oublié maintenant, il fit partie des parnassiens, admiré de Verlaine qui lui dédia son poème Jadis et de Rimbaud qui voyait en lui un visionnaire. S'il ne figure pas sur le Tableau de Fantin-Latour, Coin de Table, c'est en raison d'une dispute avec Rimbaud

lundi 10 juin 2013

Défi n°104 : La révolte de la basse-cour

C'est Eglantine-Lilas qui s'y colle chez les CROQUEURS DE MOTS pour ce défi n°104 et avant dernier avant les vacances d'été.
SOS, la terre, y a-t-il un cap'tain de quart pour nous conduire au ponton n° 105, avant de nouvelles réjouissances pour la rentrée ?

Ma petite participation, comme souvent, fait un pas de côté. Mais je pense que vous ne m'en voudrez pas trop.

jeudi 6 juin 2013

Epitaphe d'un chat, de Joachim Du Bellay

Mon jeudi en poésie principal fait un salut de chat au soleil ! (voir article précédent)

en bonus pour le défi n°104 des CROQUEURS DE MOTS mené par Eglantine-Lilas pour les lecteurs qui ont un peu plus de temps

EPITAPHE

D'UN CHAT.

MAINTENANT le vivre me fâche ; 
Et afin, Magny, que tu sçache,
Pourquoi je suis tant éperdu,
Ce n'est pas pour avoir perdu
Mes anneaux, mon argent, ma bourse ;
Et pourquoi est-ce donques ? pour ce
Que j'ai perdu depuis trois jours
Mon bien, mon plaisir, mes amours.
Et quoi ? ô souvenance gréve !
A peu que le cœur ne me creve,
Quand j'en parle, ou quand j'en écris :
C'est Belaud mon petit Chat gris :
Belaud, qui fut par avanture
Le plus bel œuvre de que Nature
Fit onc en matiere de Chats :
C'étoit Belaud la mort aux Rats,
Belaud, dont la beauté fut telle,
Qu'elle est digne d'être immortelle.
        Donques Belaud premierement
Ne fut pas gris entierement,
Ni tel qu'en France on les voit naître ;
Mais tel qu'à Rome on les voit être.
Couvert d'un poil gris argentin,
Ras & poli comme satin,
Couché par ondes sur l'eschine,
Et blanc dessous comme un hermine :
        Petit museau, petites dents,
Yeux qui n'étoient point trop ardents ;
Mais desquels la prunelle perse,
Imitoit la couleur diverse
Qu'on voit en cet arc pluvieux,
Qui se courbe au travers des Cieux.
        La tête à la taille pareille,
Le col grasset, courte l'oreille,
Et dessous un né ébenin,
Un petit mufle lyonnin,
Au tour duquel étoit plantée
Une barbelette argentée,
Armant d'un petit poil folet
Son musequin damoiselet.
        Jambe gresle, petite patte,
Plus qu'une moufle delicate ;
Sinon alors qu'il degaînoit
Cela, dont il égratignoit :
La gorge douillette & mignonne,
La queue longue à la guenonne,
Mouchetée diversement
D'un naturel bigarement :
Le flanc haussé, le ventre large,
Bien retroussé dessous sa charge,
Et le dos moyennement long,
Vrai sourian, s'il en fut ong.
        Tel fut Belaud, la gente Bête,
Qui des pieds jusques à la tête,
De telle beauté fut pourvû,
Que son pareil on n'a point vû.
O quel malheur ! ô quelle perte,
Qui ne peut être recouverte !
O quel deuil mon ame en reçoit !
Vraiment la mort, bien qu'elle soit
Plus fier qu'un ours, l'inhumaine,
Si de voir, elle eût pris la peine,
Un tel Chat, son cœur endurci
En eût eu, ce croi-je, merci :
Et maintenant ma triste vie
Ne haïroit de vivre l'envie.
        Mais la cruelle n'avoit pas
Goûté les folâtres ébas
De mon Belaud, ni la souplesse
De la gaillarde gentillesse :
Soit qu'il sautât, soit qu'il gratât,
Soit qu'il tournât, ou voltigeât
D'un tour de Chat, ou soit encores,
Qu'il print un Rat, & or & ores
Le relâchant pour quelque temps
S'en donnât mille passe-temps.
        Soit que d'une façon gaillarde
Avec sa patte fretillarde,
Il se frottât le musequin ;
Ou soit que ce petit coquin
Privé sautelât sur ma couche,
Ou soit qu'il ravît de ma bouche,
La viande sans m'outrager,
Alors qu'il me voyoit manger ;
Soit qu'il fît en diverses guises
Mille autres telles mignardises.
        Mon Dieu ! quel passe-tems c'étoit
Quand ce Belaud vire-voltoit,
Folâtre au tout d'une pelotte ?
Quel plaisir, quand sa tête sotte
Suivant sa queue en mille tours,
D'un roüet imitoit le cours !
Ou quand assis sur le derriere
Il s'en faisoit une jarretitere
Et montrant l'estomac velu,
De panne blanche crespelu,
Sembloit, tant sa trogne étoit bonne,
Quelque Docteur de la Sorbonne ;
Ou quand alors qu'on l'animoit,
A coups de patte il escrimoit,
Et puis appaisoit sa colere,
Tout soudain qu'on lui faisoit chere.
        Voilà, Magny, les passe-temps,
Où Belaud employoit son temps ;
N'est-il pas bien à plaindre donques ?
Au demeurant tu ne vis onques
Chat plus adroit, ni mieux appris
A combattre Rats & Souris.
        Belaud sçavoit mille manieres
De les surprendre en leurs tesnieres,
Et lors leur falloit bien trouver
Plus d'un pertuis, pour se sauver ;
Car onques Rat, tant fût-il vite,
Ne se vit sauver à la fuite
Devant Belaud ; au demeurant
Belaud n'étoit pas ignorant :
Il sçavoit bien, tant fut traitable,
Prendre la chair dessus la table,
J'entens, quand on lui presentoit,
Car autrement il vous grattoit,
Et avec la patte friande
De loin muguetoit la viande.
        Belaud n'étoit point mal-plaisant,
Belaud n'étoit point mal-faisant,
Et ne fit oncq; plus grand dommage
Que de manger un vieux fromage,
Une linotte & un pinson
Qui le fâchoient de leur chanson ;
Mais quoi, Magny, nous-mêmes hommes
Parfaits de tous points nous ne sommes.
        Belaud n'étoit point de ces Chats,
Qui nuit & jour vont au pourchats,
N'ayant souci que de leur panse :
Il ne faisoit si grand' dépense,
Mais étoit sobre à son repas
Et ne mangeoit que par compas.
        Aussi n'étoit-ce sa nature
De faire par-tout son ordure,
Comme un tas de Chats, qui ne font
Que gâter tout par où ils vont.
Car Belaud, la gentille bête,
Si de quelque acte moins qu'honnête,
Contraint, possible il eût été,
Avoit bien cette honnêteté
De cacher dessous de la cendre
Ce qu'il étoit contraint de rendre.
        Belaud me servoit de joüet ;
Belaud ne filoit au roüet,
Gromelante une letanie
De longue & fâcheuse harmonie ;
Ains se plaignoit mignardement
D'un enfantin miaudement.
        Belaud (que j'aye souvenance)
Ne me fit oncq; plus grand' offense
Que de me réveiller la nuit,
Quand il entroyoit quelque bruit
De Rats qui rongeoient ma paillasse :
Car lors il leur donnoit la chasse,
Et si dextrement les happoit,
Que jamais un n'en échappoit ;
Mais, las, depuis que cette fiere
Tua de sa dextre meurtriere
La sure garde de mon corps,
Plus en sureté je ne dors :
Et or, ô douleurs non pareilles !
Les Rats me mangest les oreilles :
Même tous les vers que j'écris,
Sont rongez de Rats & Souris.
        Vraiment les Dieux sont pitoyables
Aux pauvres humains miserables
Toujours leur annonçant leurs maux,
Soit par la mort des animaux,
Ou soit par quelqu'autre présage,
Des Cieux le plus certain message.
        Le jour que la sœur de Cloton
Ravit mon petit peloton,
Je dis, j'en ai bien souvenance,
Que quelque maligne influence
Menaçoit mon chef de là haut,
Et c'étoit la mort de Belaud :
Car quelle plus grande tempête
Me pouvoit foudroyer la tête !
Belaud étoit mon cher mignon,
Belaud étoit mon compagnon,
A la chambre, au lit, à la table ;
Belaud étoit plus accointable
Que n'est un petit Chien friand,
Et de nui n'alloit point criand
Comme ces gros Marcous terribles,
En longs miaudemens horribles :
Aussi le petit Mitouard
N'entra jamais en Matouard :
Et en Belaud, quelle disgrace !
De Belaud s'est perdu la race.
        Que plaît à Dieu, petit Belon,
Que j'eusse l'esprit assez bon,
De pouvoir en quelque beau stile
Blasonner ta grace gentile,
D'un vers aussi mignard que toi :
Belaud, je te promets ma foi,
Que tu vivrois, tant que sur terre
Les Chats aux Rats feront la guerre.

Par Du Bellay, Gentil-homme Angevin. 1568.

transcrit par François-Augustin Paradis de Moncrif (1727) Les Chats. Du Bellay: Epitaphe d'un chat: pp. 156-164.

Joachim Du Bellay, ~1522 - 1560, poète Français