Chanson pour elles3
Ils me disent que tu es blonde
Et que toute blonde est perfide,
Même ils ajoutent " comme l'onde ".
Je me ris de leur discours vide !
Tes yeux sont les plus beaux du monde
Et de ton sein je suis avide.
Ils me disent que tu es brune,
Qu'une brune a des yeux de braise
Et qu'un coeur qui cherche fortune
S'y brûle... Ô la bonne foutaise !
Ronde et fraîche comme la lune,
Vive ta gorge aux bouts de fraise !
Ils me disent de toi, châtaine :
Elle est fade, et rousse trop rose.
J'encague cette turlutaine,
Et de toi j'aime toute chose
De la chevelure, fontaine
D'ébène ou d'or (et dis, ô pose-
Les sur mon coeur), aux pieds de reine.
Paul Verlaine1, Chair3, 1896
Mucha2 : pour les quatre saisons
1.- Paul Verlaine, poète français, 1844 - 1896
2.- Alfons Mucha, affichiste et peintre tchèque, 1860 - 1939
3.- Chanson pour elles est le deuxième poème de l'opus Chair, 1896
en 1891, Paul Verlaine avait fait paraître un recueil intitulé Chansons pour elles et autres poèmes érotiques, pour exorciser le souvenir de ses amours passionnées avec Arthur Rimbaud