jeudi 29 juillet 2010

La lune selon Victor Hugo (III)

Pour le Jeudi en poésie sous la baguette magique de Nat.
Les Croqueurs de mots ont fait des vœux aux astres, sans les nommer, c'était la règle du jeu de mots qui se nomme liponymie

Beaucoup d'amateurs de poésie connaissent la lune selon Alfred de Musset.
Comme je me suis replongée, (avec délices) dans l'Art d'être grand-père, de Victor Hugo, je vous propose celle que le poète a bien voulu décrocher pour ses petits enfants.
Le titre se décline en quatre poèmes que je mets en ligne. Vous pouvez en lire un ou les quatre, à votre choix. Et si vous les lisez tous les quatre, peut-être sera-t-il judicieux de les relire dans l'ordre que Victor Hugo leur a donné.

Si vous voulez commencer par le début,
Le début est ICI

III

Ah ! vous voulez la lune ? Où ? dans le fond du puits ?
Non ; dans le ciel. Eh bien, essayons. Je ne puis.
Et c'est ainsi toujours. Chers petits, il vous passe
Par l'esprit de vouloir la lune, et dans l'espace
J'étends mes mains, tâchant de prendre au vol Phoebé.
L'adorable hasard d'être aïeul est tombé
Sur ma tête, et m'a fait une douce fêlure.
Je sens en vous voyant que le sort put m'exclure
Du bonheur, sans m'avoir tout à fait abattu.
Mais causons. Voyez-vous, vois-tu Georges, vois-tu,
Jeanne ? Dieu nous connaît, et sait ce qu'ose faire
Un aïeul, car il est lui-même un peu grand-père ;
Le bon Dieu, qui toujours contre nous se défend,
Craint ceci : le vieillard qui veut plaire à l'enfant ;
Il sait que c'est ma loi qui sort de votre bouche,
Et que j'obéirais ; il ne veut pas qu'on touche
Aux étoiles, et c'est pour en être sûr
Qu'il les accroche aux clous les plus hauts de l'azur.
Victor Hugo, L'art d'être grand-père, première édition 1876