lundi 13 décembre 2010

Défi n°44 des Croqueurs : A la veillée, incognito

La neige a fondu. Les bateaux de la flotte des Croqueurs de mots sont restés à quai. Marins et  moussaillons sont invités à se regrouper  bien au chaud autour de notre capitaine de quart, Hauteclaire, juste éclairés par la lampe tempête.

Si, si, c'est Hauteclaire qui l'a écrit dans ses consignes. Une lampe tempête.


Quand ?

Lundi à 8 heures du matin.

Ah oui c'est le défi des Croqueurs de mots. Et que feront les mousses cette fois-ci pour avoir besoin d'une lampe tempête ? Ils conteront à la veillée leur(s) rencontre(s) avec des célébrités ...

Une veillée à huit heures du matin, dis-donc Tricôtine, envoie lui un peu la clarté de ton néon à Hauteclaire, sa flamme vacille furieusement, dans la tempête de ses neurones. Elle a dû forcer sur le grog ...pour ne pas s'endormir. Je me demande si je vais arriver à me tenir éveillée jusque là  ... J'ai déjà des étoiles plein les yeux de fatigue rien que de penser au sujet.

S'il vous plait,FaustineAbel, venez donc m'aider à préparer mon conte. Je n'y arrive pas.

Zen, ma Jeanne. D'abord, tu sais bien que tu peux programmer ton billet pour le rendez-vous. Et puis, des célébrités, tu en as rencontré, non ? comme tout le monde ... Voyons le détail du sujet :

" Vous avez rencontré une célébrité ? Racontez nous.
Mettez-vous en scène. Plantez le décor. Faites-en un grand évènement.
Vous en avez rencontré plusieurs ? Enchaînez les histoires ...

- C'est facile, ma Jeanne, tu n'as que l'embarras du choix !

Attendez ! la consigne n'est pas terminée ... car il y a un Mais. Qui fait toute la difficulté !

" Tout bon marin a le sens de la narration, voire de l'exagération, ou de l'invention ...
Racontez au moins deux histoires, et faîtes deviner laquelle est fausse. Et si les deux le sont, faîtes croire le contraire.
Solution à votre convenance ...

Oui, ça se complique ! D'abord définir ... La pauvre Jeanne en est bien déconfite, Abel, précise donc
Célébrité : 1  renom, réputation (dans un cercle plus ou moins étendu : célébrité locale, régionale, nationale, mondiale)
2 par extension, personne illustre

Facile, des personnalités locales, j'en croise en allant chercher mon pain. Même quelques autres, quand il y a un tournage dans le coin.

Dis-moi Faustine, que trouves-tu pour rencontrer :

Ah ! c'est malin, abel, tu as tapé rencontrer sans précaution sur le moteur de recherches. Nous voilà bien maintenant, si tu veux faire des rencontres, tu n'as que l'embarras du choix. Sauf que tu ne sais toujours pas ce que cela veut dire exactement !
Rencontrer : 1 croiser quelqu'un, mon dico papier précise sans le vouloir,
2 (sport) participer à une compétition avec un adversaire (joueur ou équipe de joueurs)
3  partager les mêmes idées (Les grands esprits se rencontrent. Voltaire)

Bon, nous voilà bien, soit la rencontre est dûe au hasard. Les célébrités sont là incognito. Et la Jeanne, dans ces cas-là, soit elle n'est pas très physionomiste et elle se dit au mieux tiens c'est une tête que je connais, mais qui ? soit elle va respecter leur désir de discrétion. Normal !

Et puis cette histoire de vrai et de faux ! De quoi se plonger dans une réflexion philosophique sur la vérité, il faudrait bien plus qu'une nuit blanche pour faire la vérité sur la vérité !

En plus, tu sais bien, Faustine qu'elle ne sait pas mentir, notre Jeanne.
C'est vrai Abel, mais il lui arrive de se mélanger les pinceaux !

N'empêche, si elle n'était pas allée à la séance de Vera Drake qui était suivie d'une rencontre avec le réalisateur, elle ne l'aurait pas reconnu dans la rue piétonne, toute surprise qu'il se déplace à pied sans être dérangé par les passants le lendemain ou le surlendemain. Même qu'il était tellement perdu dans ses pensées qu'elle a dû faire un pas de côté pour éviter la collision. Inutile de te dire que lui ne l'a pas reconnue. Elle avait réussi à poser une question et même obtenu une réponse, un peu déroutante, pourtant.

Mais de qui parle-t-elle ? De Mike Leigh, l'auteur de Secrets et mensonges (palme d'or à cannes en 1996 !

Rencontrer, même dans la rue, des professionnels du cinéma au moment d'un festival du film, il n'y a quand même rien de surprenant ! C'est comme croiser Monsieur Balladur, même à pied, quand on est en vacances à Chamonix.
Ca lui est arrivée, à Jeanne ?
Ben oui, deux ou trois fois. Elle avait même été toute surprise de voir qu'il était plus petit qu'elle ne se le représentait.

Tu n'a rien de plus insolite.
Tu sais Faustine, il y a des rencontres que je préfère taire. D'ailleurs, en parler serait sans intérêt.

Mais si, celle-ci, ça va faire rire tout le monde. Rappelle-toi quand l'amie de ta marraine s'était mélangée dans sa couture !
Oh, cela ne compte pas je l'ai juste croisée dans l'escalier et l'éclairage était déficient. Je n'ai même pas pu admirer ses yeux légendaires.
Mais de qui parle-telle, Abel ? Ah, de Michèle Morgan ?

Oui, tu sais bien qu'elle était la voisine du baron. Catherine n'avait pas les moyens de prendre encore sa toute petite retraite. alors on lui avait trouvé un emploi de lingère chez le Baron de ...Sauf que Catherine, elle savait faire beaucoup de choses, coudre un ourlet, des boutons, même des boutonnières ou des reprises mais de là à faire des vêtements. Et le Baron, il lui avait demandé de lui faire des caleçons. Ce n'était plus du tout la mode à l'époque.
Ma marraine, qui était couturière, et l'amie fidèle de Catherine, lui avait fait un patron et découpé les morceaux. Mais elle avait assemblé la jambe d'un pan avec la ceinture d'un autre ... et elle n'y comprenait plus rien !
Catastrophe, les caleçons devaient être prêts et bien entendu, elle est venue demander secours à ma marraine. J'ai même aidé à découdre le deuxième pendant que ma marraine assemblait correctement et cousait le premier. Dieu que j'ai eu du mal à découdre cette couture si bien et si mal cousue !

Ensuite, il a fallu reporter les fameux caleçons ! Vous devinez que je m'étais proposée pour les ramener dans l'Ile Saint Louis, rien que pour la curiosité d'entrevoir les fastes de l'Hôtel particulier du Baron.
Peut-être le Baron, aussi, furtivement, encore que je ne savais pas quelle têt il pouvait avoir. et il était sûrement connu, parmi les gens de son monde, et les lectrices des revues à sensation (Le terme people n'était pas encore utilisé à l'époque et ce genre de revues, je ne l'ai feuilletais que chez le coiffeur ou le médecin, autant dire rarement !)

Rencontrer cette actrice mythique, je n'y songeais même pas, même si je savais par Catherine qu'elle habitait l'immeuble.
- Alors tu l'as rencontrée dans l'escalier ?
- Oui, Abel, mais je te l'ai déjà dit; la lumière était faible et je n'ai pas vu ses yeux ...

Une grande dame, une grande actrice ! Par son talent autant que par son regard?

... T'as d'beaux yeux, tu sais ... Je vois encore la scène, j'entend encore Jean Gabin ...

C'était il y a bien longtemps, une quarantaine d'années (bien plus encore pour ce film) ! La célébrité est un état qui ne dure pas forcément toute une vie. C'est une exception que l'on ne l'ait pas oubliée.

Tienez ! Je me souviens de l'air de lassitude et de découragement quand mes copines de promotion revenaient de la Maison de retraite de Ris Orangis. Elles participaient à une enquête d'économie sociale dans le cadre de nos études.
Toutes les personnes qu'elles interviewaient étaient pour nous de parfaits inconnus. Et pourtant, presque toutes avaient été au faîte de la gloire du Music hall ou du cinéma d'avant guerre. Elles auraient fini leur vie dans la misère après quelques années de grande opulence, sans la générosité des donateurs de la fondation, et notamment celle de  Picasso. Elles avaient peu de visites, faisaient encore leur star ...

Tu en as rencontré ? Non bien sûr, je n'avais pas choisi cette option. Mais mes copines revenaient de ces journées très éprouvées par ces confidences et cette misère sociale.
Mon aversion pour la célébrité ne vient pas de là. Mais je dois dire que ces veillées au coin du feu m'y ont fait plus réfléchir encore !

Hihihi ! je ne sais pas si vous allez vous retrouver dans ce qui précède. Je crois que j'ai respecté la consigne, parmi ce qui précède il y a un mensonge. Lequel ? Je vous laisse donner votre idée en commentaire. Réponse jeudi avec la poésie du jeudi.
Un lundi à transformer les marins en fins limiers ... Amusez-vous bien grâce à l'idée de Hauteclaire et belle semaine.